Pourquoi ce blog ?

Bienvenue à tous les visiteurs de ce blog !

Par le biais de ce blog, je souhaite vous faire part de mes positions politiques (les poser à l’écrit) sur certains sujets qui me semblent cruciaux et/ou peu abordés (crise des banlieues, rapports Nord/Sud, Ecologie, Fiscalité…).
De plus étant bien triste de constater à quel point les individus ont tendance à démissionner chaque jour un peu plus de leur rôle de citoyen, pour préférer un simple rôle de travailleur/sur-consommateur, ce blog sera ma très petite contribution pour essayer d’informer, faire connaître mes positions et ouvrir un débat entre citoyens.
Par ailleurs, à travers les articles de ce blog vous verrez que : faire des propositions est essentiel pour moi, car critiquer c’est bien, mais proposer une alternative c’est mieux !
D’où le titre de ce blog : alternatives citoyennes. Au reste, le but de ce blog n’est pas tellement pédagogique, pour cela je vous renvoie notamment vers des liens très intéressants.
Enfin, vos contributions, remarques, points de vue et critiques (constructives) sont évidemment les bienvenues.
Petite remarque : j’aurais parfois tendance à forcer le trait et à tenir des propos corrosifs, ceci dans l’unique but de rendre la lecture de ce blog plus captivante.

Martin Besnier

jeudi 22 juillet 2010

VI.) Police et cité: les propositions:

Venons-en à présent aux propositions visant à améliorer la stratégie policière dans les quartiers, et vous verrez qu’une fois de plus cela n’a en partie rien d’original :

1. Premièrement, il s’agirait de donner tous ses moyens à une véritable « police d’investigation ». Nicolas Sarkozy a créé en 2002 les Groupements d’Intervention Régionaux (GIR), soit des entités policières pluridisciplinaires composées de policiers, de gendarmes, de membres des Renseignements Généraux et de fonctionnaires des impôts et des douanes. Je reconnais que c’était une bonne décision. Mais cela reste insuffisant si l’on veut vraiment mettre fin aux trafics de stupéfiants, pour au moins deux raisons.

La première est que la politique du chiffre mise en place conjointement a eu pour conséquence comme nous l’avons vu de concentrer les moyens policiers sur la petite délinquance afin d’améliorer les statistiques policières et de faire croire à l’opinion publique qu’on lutte contre la délinquance. Il faudrait au contraire remonter le plus haut possible pour démanteler les trafics, ne pas s’arrêter « à la rue » mais viser les « gros bonnets » et les réseaux internationaux, ce qui demande beaucoup d’argent et surtout de temps, deux critères qui déplaisent aux hommes politiques ambitieux…
Il faudrait notamment prendre le temps de faire du vrai travail de renseignement, tellement l’omerta est présente dans certains quartiers, et se concentrer sur le trafic de drogues dures. Une petite digression à présent pour rappeler à certains journalistes sensationnalistes qu’il n’y a pas, pour le moment, de trafic d’armes dans les banlieues sensibles françaises, les armes présentent étant « juste » là pour protéger le trafic de drogue.

La deuxième raison de cette insuffisance est que l’accent n’est pas suffisamment mis sur l’argent. Les saisies de drogue (en hausse ces derniers temps) ne font pas tomber un trafic, c’est bien l’argent qu’il faut viser. Tous les grands mafieux sont tombés pour fraude fiscale, Al Capone le premier. Il faudrait ainsi augmenter les moyens de la lutte contre le blanchiment d’argent et les paradis fiscaux (voir un prochain article sur ce sujet), en donnant plus de moyens, de pouvoirs et de considération aux services fiscaux et en essayant de favoriser la coopération internationale entre services fiscaux. Mais il semble que ce dernier point ne soit absolument pas la priorité du gouvernement actuel (et de bien d’autres gouvernements d’ailleurs)…

2. Conjointement à une « police d’investigation », il faudrait aussi revenir à une certaine « police de proximité ». Enterrée en 2003 par monsieur « tolérance zéro » pour des raisons purement électoralistes, ce fut l’une de ses plus monumentales erreurs. A sa décharge, on rappellera que la police de proximité mise en place par le gouvernement Jospin restait insuffisante car elle avait été généralisée trop vite sans augmentation parallèle des moyens, par un J.P. Chevènement trop jacobin.
Par ailleurs, on remarquera que N. Sarkozy, une fois président de la République, est revenu partiellement sur ses erreurs, Michèle Alliot-Marie ayant créé en 2008 les Unités territoriales de quartier (Uteq) et les Compagnies de Sécurisation (CS) même s’il ne s’agit pas vraiment d’une police de proximité au sens ou beaucoup d’observateurs l’entendent.
Les Compagnies de Sécurisation sont en quelque sorte une « police de proximité de choc », une police anti-émeute de banlieues, composée de groupes très mobiles en uniforme et en civil et disposant de techniques et de moyens quasi-militaires (usage de Taser, Flashball, lunettes infrarouges, drones, hélicoptères…). Elles disposent aussi de moyens et pouvoirs judiciaires à travers une équipe de procéduriers.

Décrivons à présent la « police de proximité » que j’appelle de mes vœux. Il s’agirait tout d’abord de mettre fin à la politique du chiffre, de ne plus mettre la pression sur le personnel policier pour obtenir des résultats rapides mais médiocres, mais de leur laisser le temps de construire une action de long terme efficace. Cette « police de proximité » devra ainsi commencer par restaurer le contact avec les habitants et les jeunes des quartiers sensibles (ce qui va être bien difficile vu l’état des tensions actuelles, dû en partie à la stratégie policière évoquée dans l’article précédent). Elle serait composée de policiers connus de tous (joignables facilement par les habitants du quartier, par téléphone notamment) et disposerait de quelques « indics » fiables dans les quartiers.
Elle prendrait la forme de groupes mobiles très présents sur le terrain et connaissant les moindres recoins d’un quartier sensible. Ses policiers effectueraient une répression ciblée sur le noyau dur de délinquants au lieu de réaliser des contrôles d’identité systématiques et généralisés à tous les jeunes du quartier.
Une telle police spécifique aux « cités » nécessiterait en outre certains ajustements fonctionnels :
- Il faudrait tout d’abord affecter plus de moyens et d’effectifs dans les quartiers sensibles. Mais cette solution, très souvent évoquée par un Parti Socialiste en manque d’imagination, resterait largement insuffisante.
- Il serait aussi nécessaire de réaliser une meilleure formation des novices et de faire appel à plus d’hommes et de femmes d’expérience. Rappelons ainsi que 80% des policiers présents dans les banlieues sensibles sont de jeunes provinciaux à peine sortis de l’école de police…Par exemple, une formation spécifique et des avantages pourraient être donnés à des hommes et femmes volontaires pour travailler dans les quartiers les plus sensibles.
- Il s’agirait par ailleurs de mettre fin au fort « turn over » au sein des affectations de policiers et notamment des commissaires. Ainsi, une stratégie de long terme pourrait être mise en place par des équipes de policiers soudées et averties.
- Mais surtout il me semble primordial d’ouvrir la production de la sécurité à d’autres acteurs partenaires. C’est d’ors et déjà le cas avec les élus notamment, dans le cadre des Conseils Locaux de Sécurité et de Prévention de la Délinquance (CLSDP) mais cela reste selon moi insuffisant, la police étant un milieu très renfermé sur lui-même… On pourrait ainsi imaginer des instances de coproduction de la sécurité regroupant des policiers, des élus, des éducateurs, des personnels d’antennes de mairie et de l’éducation nationale…Enfin, il serait intéressant d’expérimenter des tentatives de « community policing » (comme aux Etats-Unis) à travers des séances de « problem solving » entre policiers et habitants d’un quartier, qui seraient encadrées par des chercheurs universitaires. Il s’agirait une fois de plus de coproduire la sécurité et de lutter contre le sentiment d’insécurité des habitants, les policiers rendant compte de leur action sur le quartier tandis que les habitants exerceraient un contrôle social collectif à l’échelle de celui-ci.

En résumé, il s’agirait donc d’associer police de proximité et police d’investigation, l’une et l’autre étant indissociable pour permettre une lutte efficace contre la délinquance et les trafics (notamment pour faire un travail de renseignement plus fouillé).

3. Par ailleurs, un autre pilier fondamental de cette stratégie passe évidemment par la prévention de la délinquance. Il s’agirait ainsi de donner une nouvelle fois plus de moyens et de considération aux éducateurs de rue, aux travailleurs sociaux, aux associations de quartier, aux personnels de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ)…
Par ailleurs, cette prévention de la délinquance passe logiquement par la lutte contre le décrochage scolaire au sein de l’éducation nationale (voir l’article suivant) et par une responsabilisation collective des parents par le biais de la participation (voir l’article à ce sujet).
A côté de cela, on remarquera qu’il existe déjà quelques dispositifs innovants (que je ne détaillerai pas) qui ont fait plus ou moins leurs preuves : avec par exemple, les offices de la tranquillité publique, les organismes de médiation citoyenne et les citoyens référents, ou encore les intervenants sociaux présents au sein de certains commissariats de police.

4. Pour finir je souhaiterais tenter de relancer un débat qui concerne la lutte contre le trafic de stupéfiants. Précisons d’ailleurs que le trafic de drogue ne représente qu’une partie seulement de l’économie souterraine présente dans certains quartiers avec le travail au noir en tout genre, les contrefaçons ou encore la revente de pièces détachées de véhicules motorisés.
J’ai insisté tout à l’heure sur la nécessité de mettre en place une véritable police d’investigation. Mais à vrai dire, dans certains quartiers (pas tous heureusement), les trafics sont tellement bien organisés et hiérarchisés, l’omerta est tellement installée au sein d’habitants effrayés (notamment les « nourrices »), que l’action policière aurait ses limites. Toute arrestation d’un « gros bonnet » ne ferait que susciter la convoitise de nouveaux dealers qui prendraient la suite. D’autant plus que la lutte contre les paradis fiscaux et l’évasion fiscale n’est vraiment pas pour demain et que la mise en place d’une police de proximité efficace demandera du temps.
Le trafic de drogue représentant environ deux milliards d’euros par an en France, il fait ainsi littéralement « vivre » certains quartiers. On remarquera cependant que seuls les gros bonnets gagnent beaucoup dans ce trafic, les petits dealers, les revendeurs, les nourrices, les jeunes qui « chouf » (surveillent)…se font carrément exploités ! Ils sont bien mal payés alors même que ce sont eux qui prennent le plus de risques et ceux sur lesquels porte le plus souvent l’action policière comme nous l’avons vu.

Bref, face à une situation parfois désespérée, je tente très modestement (en comparaison avec le courageux maire de Sevran : Stéphane Gatignon) d’ouvrir le débat sur la sortie de la prohibition des drogues douces, par la dépénalisation ou la légalisation.
Je précise tout de suite que je ne suis pas consommateur de drogue douce (ni dure d’ailleurs), même occasionnel, tous mes proches pourront en témoigner, je n’ai donc aucun intérêt personnel à la dépénalisation de telle ou telle drogue.
Pourtant arrêtons l’hypocrisie, il y a plus de quatre millions de consommateurs réguliers de cannabis en France ! L’alcool et le tabac sont deux drogues légalisées et qui ont elles aussi des effets dévastateurs.
La sortie de la prohibition pourrait peut être permettre de casser certains trafics en créant un nouveau cadre légal, un marché économique régulier. Cela permettrait possiblement de mettre fin aux règlements de comptes liés à la drogue et à l’omerta très présente dans certains quartiers, rendant ainsi le travail de la police plus facile et la vie de certains habitants complètement apeurés tout simplement « vivable ».
A côté de cela, on pourrait imaginer une multiplication des actions de prévention dans les collèges, lycées, boîtes de nuit ou encore la création de campagnes publicitaires anti-drogue douce sur le modèle des spots visant à lutter contre l’alcoolisme, le tabagisme ou pour la sécurité routière. Par ailleurs, des moyens supplémentaires pourraient être affectés aux centres thérapeutiques pour toxicomanes.
Tous ces dispositifs, qui seraient éventuellement financés par une forte taxe sur les drogues douces en vente libre, porteraient le message que « ce n’est pas parce que c’est légal, que ce n’est pas dangereux pour votre santé ». En outre, la vente de drogues douces dans un cadre légal permettrait sûrement de mieux contrôler la « qualité » des stupéfiants vendus, car dans le cadre des trafics, les drogues douces sont souvent mélangées avec des saloperies encore plus néfastes.
Cependant, le gros argument en défaveur de cette sortie de la prohibition reste le problème de la possible substitution à d’autres produits illicites, à la réorganisation des trafics vers des drogues plus dures ou vers le trafic d’armes…Ma supposition (et je peux me tromper) est que la réorganisation se fera pour les trafics les mieux organisés qui brassent beaucoup d’argent (auquel cas il faudra intensifier les investigations policières) mais que les nombreux petits trafiquants et revendeurs qui n’ont pas accès aux drogues dures n’y survivraient pas.

Pour résumé, je ne sais pas si c’est une bonne solution, mais ce que je sais c’est qu’un débat public sérieux qui pourrait s’appuyer sur différentes études scientifiques indépendantes sur la question devrait avoir lieu. Au lieu de ça, ce débat reste un tabou entre une droite démagogique et une gauche amorphe.

Liens utiles pour approfondir :

- BRONNER Luc ; La loi du ghetto : enquête dans les banlieues françaises.

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